Les dernières pluies tuent mon palmier dattier centenaire.
Posté : 07 déc. 2014, 00:40
Il était un palmier dattier dans mon village Yachech si heureux, si fier d’être le seul respecté par la municipalité des années 20 à ne pas être déplacé ou abattu pour construire la route.
Tout petit enfant des débuts des années 40, je le trouvais déjà assez grand et assez généreux pour offrir aux passants ses fruits « gratis ». A l’âge de 8 ans, j’avais confectionné moi aussi, comme mes semblables une tir- boulettes que j’utilisais pour secouer la grappe de dattes pour apaiser ma faim.
Avant de lui lancer la « balle » je lui parlais, je le suppliais d’être plus généreux pour mon estomac. Je ne manquais pas de le remercier avant de le quitter. Il me connait, je le connais. Je le salue chaque matin quand je me rends à l’école primaire de Talborjt. Je le vois me sourire et fait bouger féeriquement ses palmes pour me dire de s’appliquer en classe de Mme Coêffic, de Mme Berthelon, de Mme Becky, de Mme Faccio, de M. Pilli, de M. Puchu, de si Thami et de si Othmani.
Moi et maman au passage sur le pont en 1951-52
Je pressais le temps pour y retourner vite dans mon village et de lui rendre compte que la journée était « bonne ». Une brise marine soufflait et du haut, très haut, je vois une pie qui m’envoyait 3-5 fruits de couleur orange et du gout acide adouci.
Au fil des années, ce camarade palmier avait pu instaurer une sincère amitié avec moi, avec les autres. On ne le brutalise pas, on ne le dérange pas pour notre plaisir. On respecte le moment de fécondation et ne passons jamais à côté sans lever les yeux pour le regarder aux yeux et lui dire silencieusement « bonjour, nous te sommes reconnaissants ». Juste au tremblement de terre, il perdait son compagnon plus jeune. Il avait alors subit 2 grands drames aux mois de février et de mars 1960.
Les temps passaient, il vit seul. Le village Yachech est anéanti à 100/100. Les survivants quittent les lieux déclarés zone interdite.
Il ne supportait pas la nouvelle situation. A chaque fois que je pouvais, je lui rends visite. Je m’arrête et je médite un grand moment aussi bien pour lui mais aussi pour maman qui est enterrée à quelques mètres de lui.
Le même lieu sans le palmier.
Il a tenu jusqu’au 28 novembre 2014. Les grandes intempéries inhabituelles du Souss cette année lui sont fatales. Il a rendu l’âme sans obstruer la route, ni choisir l’oued Tildi pour se retrouver à l’Océan comme tant d’autres.
Merci à toi M.Palmier, tu as écrit une page d’histoire dans cette cité Yachech, je te rends hommage.
Lahsen Roussafi
Tout petit enfant des débuts des années 40, je le trouvais déjà assez grand et assez généreux pour offrir aux passants ses fruits « gratis ». A l’âge de 8 ans, j’avais confectionné moi aussi, comme mes semblables une tir- boulettes que j’utilisais pour secouer la grappe de dattes pour apaiser ma faim.
Avant de lui lancer la « balle » je lui parlais, je le suppliais d’être plus généreux pour mon estomac. Je ne manquais pas de le remercier avant de le quitter. Il me connait, je le connais. Je le salue chaque matin quand je me rends à l’école primaire de Talborjt. Je le vois me sourire et fait bouger féeriquement ses palmes pour me dire de s’appliquer en classe de Mme Coêffic, de Mme Berthelon, de Mme Becky, de Mme Faccio, de M. Pilli, de M. Puchu, de si Thami et de si Othmani.
Moi et maman au passage sur le pont en 1951-52
Je pressais le temps pour y retourner vite dans mon village et de lui rendre compte que la journée était « bonne ». Une brise marine soufflait et du haut, très haut, je vois une pie qui m’envoyait 3-5 fruits de couleur orange et du gout acide adouci.
Au fil des années, ce camarade palmier avait pu instaurer une sincère amitié avec moi, avec les autres. On ne le brutalise pas, on ne le dérange pas pour notre plaisir. On respecte le moment de fécondation et ne passons jamais à côté sans lever les yeux pour le regarder aux yeux et lui dire silencieusement « bonjour, nous te sommes reconnaissants ». Juste au tremblement de terre, il perdait son compagnon plus jeune. Il avait alors subit 2 grands drames aux mois de février et de mars 1960.
Les temps passaient, il vit seul. Le village Yachech est anéanti à 100/100. Les survivants quittent les lieux déclarés zone interdite.
Il ne supportait pas la nouvelle situation. A chaque fois que je pouvais, je lui rends visite. Je m’arrête et je médite un grand moment aussi bien pour lui mais aussi pour maman qui est enterrée à quelques mètres de lui.
Le même lieu sans le palmier.
Il a tenu jusqu’au 28 novembre 2014. Les grandes intempéries inhabituelles du Souss cette année lui sont fatales. Il a rendu l’âme sans obstruer la route, ni choisir l’oued Tildi pour se retrouver à l’Océan comme tant d’autres.
Merci à toi M.Palmier, tu as écrit une page d’histoire dans cette cité Yachech, je te rends hommage.
Lahsen Roussafi