Juin en Juillet ou Août 60 ième anniversaire

Vos souvenirs et anecdotes sur la vie à Agadir avant le tremblement de terre.

Modérateur : Raspoutine

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migranger
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Juin en Juillet ou Août 60 ième anniversaire

Message par migranger »

Juin en juillet ou août, colonie de vacances, il y a 60 ans !

Venant d’Anza, il y avait deux routes pour rentrer à Founti, d'après mes souvenirs : celle du haut reliait le camp Alibert et le camp Haida, et celle du bas était la route nationale. Près de la maison de France, des rues liaient ces deux routes. Elles étaient très pentues et c'était là que je voyais "les grands" faire des courses sur leurs caisses à roulement à billes.
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Une fois sur la petite place de Founti, j'ai vu une chikaya entre deux adultes en djellaba rayée. Ils se menaçaient l'un et l'autre et plus, ils faisaient mine de se rapprocher, plus les spectateurs les retenaient en les agrippant.
Il y avait là de très petites échoppes toutes alignées. L'une était tenue par un peintre de bicyclettes. Deux cadres de vélos démontés étaient suspendus, et le peintre tournait autour en pompant avec une pompe "flytox" remplie de peinture.
Quelquefois j'allais seul jusqu'à Talbordjt, la grande ville, et je flânais rue de la Kissaria et dans les deux marchés, l'ancien et le nouveau, rarement au souk. Puis je retournais à pied à la maison et je gardais l'argent de l'autobus que mes parents me donnaient. Je longeais la rue nationale tout du long et je savais bien que tout le monde savait que je passais. Il y avait peu de petits Européens qui faisaient pareil et le "chouf" ou la surveillance des Marocains faisait qu'on se sentait en sécurité. Je n'allais pas encore à l'école. Une fois j'ai ramené ma sœur Annie sur mon dos de Talbordjt au vieux port; je me suis arrêté à la fontaine de Founti pour boire et reprendre des forces. Et je disais à ma sœur : Avec l'argent du car, tu pourras t'acheter des bonbons chez Oubaha.
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Nos parents nous encourageaient à aller chez tous les commerçants. On a appris ainsi jeune ceux qui n'aimaient pas les enfants. A l'entrée du port en descendant sur la droite était l'épicier Oubaha, qui nous couvrait de bonbons; en face devant
la bascule des camions, l’épicier Esclapez ou Garcia (on l'appelait Monsieur "Spagnol") était sec comme ses morues qui étaient à sécher au-dessus de son comptoir.
Quittant Founti par la route d’Anza, on arrivait devant le petit marabout qui dominait le port, puis toujours sur notre gauche on passait devant le restaurant-buvette Villaplana, puis Monsieur "Spagnol", puis la bascule aux camions (en face d'Oubaha), puis un café maure ou des clients jouaient aux dames sur de vieux cartons avec des lignes faites au charbon de bois, puis la grille de la douane. Cette entrée fut définitivement condamnée lorsque le nouveau port fut mis en service. De la grille à la recette des douanes, il y avait peut-être 25 mètres.
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Début juillet 52, on m'envoya à la colonie de vacances organisée pour les jeunes d'Agadir. C'était à Imouzer du Kandar. On a tous embarqué dans l'autobus qui était ni Pullmann ni CTM. Ça puait l'essence. On a roulé de nuit et le klaxon était à l'intérieur de l'autobus -- un sadique avait inventé ça. La deuxième nuit on a dormi à Casa au quartier bourgogne, que je reconnaissais, ayant habité rue du Lt Garret jusqu’au début 49. Puis arrivé à Imouzer on a dormi sous les tentes. Il y avait des pierres blanches chaulées et alignées qui délimitaient le bord des chemins du camp à la manière des camps militaires.
J'étais le plus jeune mais je ne voulais pas aller avec les plus jeunes; je voulais voir les grottes avec les moyens. Alors escapades et renvois au camp et donc promenades dans la montagne seul. Une fois des officiers militaires en jeep m'ont barré la route, mais devant mon assurance ils ont décidé que je n'étais pas perdu et m'ont laissé filer. Lorsque je rencontrais de jeunes bergers berbères chacun se tirait de son coté. J’appris à me cacher en observant les mouvements dans le camp pour revenir au bon moment. La nuit pour aller aux WC, qui étaient plus loin dans la forêt, il fallait réveiller un surveillant; la première fois il était tellement lent que je l'ai croisé en redescendant. Ensuite je n'ai plus réveillé personne. Pour nous faire peur, on parlait des singes de barbarie de la montagne, mais la nuit comme nous tous ils devaient dormir. Dans le camp l'un des surveillants était Rondeau, qui devint prêtre.
Un jour on nous a tous réunis pour nous présenter la plus haute autorité: c'était Alphonse Juin. On était tout en ligne et on m'a appelé avec un autre. Et le présentateur a dit: Voici notre infirmier et voici le plus jeune qui a 6 ans (jamais dit nos noms). Il y avait deux vieux militaires en face de nous, l'un tout plein de décorations très impressionnantes devait être l'aide-de-camp, et l'autre sans décorations devait être Juin. Serrage de mains. Je n’ai jamais su si j’avais serré la main à un général ou à un maréchal, car il devint maréchal le 14 juillet 1952, jour de mes 7ans. J’ai l’impression que le présentateur s’était trompé et je que je n’avais plus 6 ans. Aujourd’hui a 67 ans je suis plus âgé que ce vieux maréchal d’alors.

Le jour du 15 août un surveillant m'a appelé et m'a dit : Tu as un petit frère (François, le N°5). Peu après, lorsque je suis revenu à la maison, ma mère m'a mis à tremper tellement, j'étais sale. Mais, j'avais une belle collection de roches, ce qui équilibrait, dans mon sac à dos, le linge que j'avais perdu.
Michel Granger

cristiane marbec
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Re: Juin en Juillet ou Août 60 ième anniversaire

Message par cristiane marbec »

bonjour Michel.
Ton récit m'a fait plaisir car j'habitais Founti avec mes parents et mes trois frères.Richard qui est décédé dans le tdt avait je pense ton âge.Mes deux autres frères étaient plus âgé que moi. Nous habitions un logement de fonction prés de Mr Dupont qui travaillait avec mon père aux affaires indigènes,les Cloiseau,les Mindrein,et une autre maison,il y avait un petit garçon de l'âge aussi de Richard,je ne me souviens plus de son nom.Mes frères ainés faisaient de la planche à roulette avec d'autres copains de leur âge.Je suis retournée à l'ancien Founty au début on retrouvait bien le mur qui surplombait le port.Nous étions souvent assis sur ce mur,il y avait des palmiers.Elle s’appelait la rue Alibert.Il reste encore quelques palmiers avant le port,et on retrouve aussi le clos de boules où mon père allait .Le clos de boules est juste une plaque de béton.J'ai pris quelques photos lors de mes séjours.Que de bons souvenirs.Je pense que tu étais en classe avec Richard.
Merci pour ce souvenir.
Amitiés.Christiane

Raspoutine
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Re: Juin en Juillet ou Août 60 ième anniversaire

Message par Raspoutine »

Bonjour Cristiane

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Un bon moment sans tes nouvelles sur le site. Heureux de te lire sur ton "fief" Founti que tu connaissais enfant. Il serait intéressant que tu nous décortiques sur photos chaque maison et ses locataires pour nos mémoires, suivant tes souvenirs.
Je ne dirais pas dommage que les bulldozers ont aplatis founti, mais je dirais que c'est un CRIME envers nos mémoires. Il n'y a aucune raison de détruire les murs et refuges longeant cette rue Alibert.
il n' y a aucune raison culturelle de détruire les vestiges de ce que les portugais avait commencé vers 1735. Aussi ces beaux palmiers qui entouraient le Square Founti. Nous demandons aux ministères de la Culture, tourisme de restituer ces endroits tels qu'ils étaient pour notre tourisme et nos mémoires et non de dénaturer ce terrain tout cours.
Amicalement. Lahsen

cristiane marbec
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Re: Juin en Juillet ou Août 60 ième anniversaire

Message par cristiane marbec »

bonjour Raspoutine,sur cette photo on voit notre maison,juste derrière la tète du bouricot,elle avait deux étages et il y a les palmiers en face ,le port n'existait pas encore .La mer venait contre ce mur.Ensuite il y a eu la dragueuse et ensuite le nouveau port.La maison je la situe en face de la coupole de la douane.J'ai des photos prises sur le muret qui le montre bien.Amicalement.Christiane

migranger
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Re: Juin en Juillet ou Août 60 ième anniversaire

Message par migranger »

Bonjour Cristiane,
J’ai regardé ton message plusieurs fois depuis le 4. Je n’arrive pas à m’y remettre on était voisins sans le savoir. J’ai souvent regardé la ou vous habitiez, car le balcon de la chambre des garçons regarde coté Founti. Les Nagy ont aussi habité au TP-Founti vers 1949. Mon père avait pris un film {le lendemain?} pris de la route du bas ou l’on voit le défilement de Founti détruit. Une copie est avec Azrou. Je ne me souviens pas de Richard, mais retrouvant des anciens d’Agadir des années plus tard, je me rends compte que mes souvenirs de cette période sont très inégaux. Mon courriel est 3granger@gmail.com, si tu veux plus de renseignements.
Amitiés.
MG

cristiane marbec
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Re: Juin en Juillet ou Août 60 ième anniversaire

Message par cristiane marbec »

je viens de rentrer de chez ma fille et lu ton message.Ma maison n'avait pas de balcons mais des fenêtres donnant sur la mer .On voit bien le muret où nous nous assoyons souvent. Beaucoup de nos photos sont prises là. Par email, je t’envoie une de ces photos, tu nous reconnaitras surement. Je pense que Richard avait ton âge. J'ai retrouvé beaucoup de copains de Richard : Villaplana Vincent, Suzane Otéro qui vit toujours à Agadir, Bouffard Jean, Perez Juan, Ferrara Victor. Je t'envoie quelques photos.
Amitiées.Christiane

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